Les nationalisations sont de facto dans l’actualité et dans politique l’agenda de la deuxième économie de l’Union européenne, après l’annonce des positions programmatiques du gouvernement minoritaire à l’Assemblée nationale française par le Premier ministre. C’est comme si l’histoire politique se moquait de nous en face : pour la deuxième fois en deux ans, l’extrême centre néolibéral met en œuvre des politiques interventionnistes étatiques et atteint l’extrême de la « nationalisation ».
Face aux grandes impasses sociales et économiques auxquelles la désorganisation néolibérale a abouti, la crise énergétique et environnementale conjuguée à la crise sanitaire ont déclenché un changement de sens du mouvement du balancier politique. Nous l’avons vu lors des récentes élections présidentielles et législatives.
La pandémie avec la crise sanitaire qui a déclenché le système de santé publique désorganisé dans les pays de l’UE a mis en évidence la nécessité d’une intervention de l’État pour protéger la santé des personnes, maintenir la cohésion sociale et le fonctionnement de l’économie.
Dès le premier jour de la pandémie, la nécessité de l’intervention de l’État dans l’organisation des services de santé, dans la formation des personnels de santé, dans l’information des citoyens, etc. a été mise en évidence.
Dès octobre 2020 en Grèce, dès mars 2020 en France, l’incapacité du Secteur Privé à participer à la gestion de la crise sanitaire a été mise en évidence. La reconstruction de l’État-providence et l’hégémonie de l’État dans le secteur privé de la santé (ndlr : privé signifie grands trusts) est déjà devenue un besoin ressenti par les citoyens.
Depuis novembre 2020 avec l’apparition des vaccins, au-delà de la question des brevets, la nécessité de se réorganiser sous l’hégémonie étatique de l’industrie pharmaceutique nationale est apparue qui doit participer non seulement à la production de vaccins de nouvelle technologie (ARNm) mais aussi à la nouvelle révolution technologique en cours dans la médecine diagnostique et thérapeutique.
Il est caractéristique que, selon une publication du journal faisant autorité Le Monde Diplomatique1 la société pharmaceutique française (géant) Sanofi n’a pas réussi à développer un vaccin à ARNm en raison de la désorganisation du département Recherche et Développement après la mise en œuvre des politiques de restructuration néolibérales de l’entreprise (ajustement des objectifs stratégiques aux petits marchés à forte rentabilité, licenciements, réductions de salaires, fusions de départements, etc.) . En conséquence, pendant la phase critique de la course au développement du vaccin à ARNm contre le SRAS-CoV-2, les laboratoires Sanofi n’ont pas pu produire les réactifs clés nécessaires à la préparation du vaccin. Sanofi a acheté ces réactifs à des partenaires extérieurs mais une erreur s’est glissée dans la dilution de l’échantillon…
Aujourd’hui, les prescriptions néolibérales pour la gestion des crises non seulement ne peuvent pas répondre aux nouveaux besoins mais conduisent à des résultats désastreux. Un exemple classique est désormais la gestion de la pandémie en Grèce.
D’après les faits, il semble que nous aboutissions au même résultat désastreux dans la gestion de la crise énergétique.
Nous savons, de l’expérience douloureuse de la gestion de la pandémie, que le personnel politique du néolibéralisme – le centre soi-disant et extrême – ne peut pas mettre en œuvre et gérer efficacement des politiques basées sur l’interventionnisme de l’État, non pas parce qu’ils sont “incompétents”, “incompétents” ou ” menteurs” (c’est une analyse puérile et tragiquement erronée) mais parce qu’ils sont des néolibéraux dogmatiques et des élitistes détachés de la réalité sociale et des besoins des couches populaires.
Avec les déclarations programmatiques du Premier ministre français et avec l’utilisation du terme « planification centrale » pour faire face à la crise écologique, on comprend que la politique revient à l’économie. Le pendule de l’histoire a déjà commencé à reculer, mais il n’est pas certain qu’il ira dans une direction progressiste car, dans les pays de l’UE, l’extrême droite est soit renforcée et tapie, soit à l’intérieur des gouvernements néolibéraux ou coopère avec eux .
Il est temps pour la gauche et la faction progressiste au sens large de faire un pas en avant : non seulement écouter la société et proclamer la défense des quelques « acquis » qui restent mais proposer à la société un programme global où les nationalisations seront au cœur et sa logique, la connaissance scientifique seront son âme et la dignité du peuple travailleur, la dignité des classes populaires et petites et moyennes seront son frontispice et son but.
(Grigoris Gerotziafas est un citoyen grec et français)
Références:
1 – Vois ici